«  1h23. Voilà l’heure à laquelle j’étais sûr d’être né. Mais de toute façon, cette heure, je m’en foutais pas mal. Non pas que c’était inintéressant, mais c’était tout bonnement un détail de plus que je me refusais de savoir. Alors forcément, ce genre de bavardage inutile, je passais. Mais, comme tout ce dont j’étais sûr autour de moi, ce n’était qu’un mensonge. Un mensonge, encore et toujours pour changer. En comparaison avec ceux que j’ai reçu à la figure, mon heure de naissance, croyez-moi, était bien le dernier de mes soucis. Comme quoi, il ne faut jamais délaisser les détails de leur importance…

J’ai grandi dans une famille, qui, aux premiers abords, procure de l’envie, de la jalousie. Oui, mes parents étaient aisés, oui, nous avions de bonnes manières… Cependant, ce que les autres ne savaient pas, c’est que c’était l’enfer. Etrangement, cette famille, je n’ai jamais pu m’y adapter. Et pourtant, au début, je me croyais vraiment des leurs. Mais, plus je grandissais, plus je sentais cette différence me peser. Je ne ressemblais pas à mon père, violent et impatient, qui me battait à la première occasion, ni  à ma mère, manique et perfectionniste,  à la limite de la maladie. Seule ma sœur, qui était pourtant très différente de moi, par un caractère doux et discret avait quelque similarité dans sa façon de penser.

A mes quatorze ans, alors que j’avais, intérieurement cette haine pour mes parents, j’ai découvert qu’il leur était impossible d’avoir des enfants pour des problèmes de fertilité. J’avais été adopté. Pour certain, être adopter, c’est bien. Ils savent qu’ils ont eu une mère qui les a abandonnés pour x ou y raisons, mais ils se retrouvent entourés dans une famille qui les aime. Mais moi, j’ai régis différemment. Savoir qu’eux, n’étaient pas mes parents fut à la fois un soulagement et un bouleversement. Des questions trottaient dans ma tête, de plus en plus présente. Des questions auxquelles je ne pouvais pas répondre.

Quelques réserves de nourriture, un pull et des baskets, mon sac était fait. J’avais l’intention de partir, seul, durant la nuit. Quitté ces fous, après une enfance que, j’assume d’appeler « maltraitance », était clairement, mon plus grand rêve. Mais, les plans ne se passent pas toujours comme prévu. Alors que j’étais sûr le point de m’enfuir, ma sœur me rattrapa et me supplia de ne pas la laisser là, dans cette maison, avec ces parents. Ne voulant pas renoncer à partir, elle vint avec moi.

Notre but ; Retrouver nos parents. Nous avions des familles différentes, certes, mais elle restait, à mes yeux, ma sœur. Seulement, difficile de se renseigner, quand on a quatorze ans et qu’on a plus de toit. Durant deux ans, nous avons survécu, passant de rue en rue, mangeant les restes et les poubelles. Les gens avaient pitiés, et nous donnait parfois un toit, une couverture ou même une tranche de pain. Mais j’étais trop fier pour accepter, et trop protecteur pour ne pas tout lui laisser. A seize ans, à la rue depuis deux ans, nous nous étions habitués à cette vie. Nous avions établis notre petite résidence, entre deux rues peu fréquentées, et nous avions même des connaissances et amis dans le même cas que nous. Des ados de la rue. Notre routine s’était installée, et il est vrai que nous avions quelque peu oublié ce pour quoi nous étions là. Mais notre origine n’avait plus vraiment d’importance.  

Notre petite bande s’en sortait plutôt bien, nous étions devenus de vrais frères avec le temps. Chaque soir, Jared, le plus grand d’entre nous, racontait des histoires à en dormir debout. C’était drôle –grâce à mes interventions incessantes je suppose…- Il parlait sans cesse de fiction, de ces vampire, ces loups-garous et autres bêtes inventées.

Notre petite bande s’en sortait plutôt bien, nous étions devenus de vrais frères avec le temps. Chaque soir, Jared, le plus grand d’entre nous, racontait des histoires à en dormir debout. C’était drôle –grâce à mes interventions incessantes je suppose…- Il parlait sans cesse de fiction, de ces vampire, ces loups-garous et autres bêtes inventées.

Nous nous en sortions bien, ce n’était pas facile tout les jours, mais au moins, elle et moi n’étions plus les sujets de personne. Je me sentais presque chez moi, dans un univers où je n’avais pas besoin de faire l’acteur.

-Tu sais que tu es l’un des leurs n’est ce pas ?

Jared était bizarre, il suffisait de lui parler pour le comprendre. Mais, à force, au lieu de le mettre de côté, je sentais que quelque chose en moi changeait, ou sortait enfin de sa coquille.

Jusqu’au jour où… Je me transformai. Incontrôlable, mes pensées et mes actions n’étaient pas accordés, je voyais, sentais et regardais les choses d’une autre perspective. Beaucoup plus simple, beaucoup plus dangereuse. J’avais du mal à me contrôler, et j’étais devenu un danger pour les miens. Jared me proposa un établissement. Peu connu, mais créé pour les gens, comme moi. Ceux qui sont nés à minuit.»